En Norvège, les jeunes en résidence alternée se portent bien

Une équipe de recherche norvégienne, conduite par Sondre Aasen Nilsen, a récemment publié une étude portant sur plus de 7 000 jeunes de 16 à 19 ans. Cette évaluation ne montre pas de différences entre les jeunes des familles non-divorcées ou en résidence alternée en ce qui concerne leur santé psychique, leurs émotions et leurs manières d’être avec les autres.

Ce résultat sur les adolescents vient appuyer les études récentes sur la même question avec des enfants très jeunes.

Plus les études s’accumulent, plus les résultats convergent pour montrer que les enfants et les jeunes qui ne rencontrent pas régulièrement leurs deux parents sont souvent sujets à des difficultés graves sur plusieurs domaines, telles que la scolarité ou la santé.

Comment procède cette étude ?

La résidence alternée : une modalité qui se généralise en Norvège

La fréquence de la résidence alternée a plus que triplé en Norvège entre 2002 (8%) et 2012 (25%). Cette hausse s’accompagne d’une baisse de la garde pleine par la mère seule.

Cet accroissement intrigue les équipes de recherche comme les politiques. Les études montrent en effet que les conséquences de la séparation des parents sont toujours une préoccupation, malgré le haut niveau de la prévention sociale et des systèmes de santé des pays scandinaves.

La dernière étude norvégienne date de 1997. Cette étude montrait que les jeunes vivant en résidence alternée avaient des résultats meilleurs que ceux vivant en résidence pleine chez un parent ou avec un beau-père. Mais à l’époque, on pouvait penser que les parents choisissant la résidence alternée avaient de meilleurs revenus, une éducation supérieure ou un moindre niveau de conflit que les autres.

Aujourd’hui, avec la diffusion de la modalité de résidence alternée, les études montrent que les familles qui choisissent cette modalité sont beaucoup plus diverses qu’auparavant. Tous les niveaux économiques, culturels et de coopération parentale sont représentés.

Comparer la santé des adolescents dans 6 structures familiales

Les 7750 jeunes ont 17 ans en moyenne et vivent en famille non-divorcée, avec leurs parents (5 500), en résidence alternée (400), avec leur mère seule (1000), leur père seul (200), un beau-père (550) ou une belle-mère (100).

Ces jeunes disposaient de 45 minutes, la plupart du temps en classe sous surveillance d’un enseignant, pour répondre à un questionnaire. Il leur était demandé de noter leur niveau de revenus par rapport aux autres et de répondre à 25 questions du Strengths and Difficulties Questionnaire, comme dans les études de Bergström. Ce questionnaire concerne les émotions, les conduites à problème, l’hyperactivité et l’attention, les relations aux autres et les comportements pro-sociaux (coopération sociale).

L’échantillon est suffisamment grand pour réaliser des statistiques multivariées qui permettent de contrôler certains facteurs.

Les résultats bruts montrent que les jeunes des familles monoparentales ou vivant avec un beau-parent rapportent plus de difficultés que ceux en familles unies ou en résidence alternée.

Quel que soit le niveau de revenu de la famille, tel qu’il est perçu par l’adolescent.e, et quel que soit le genre du jeune, ces résultats se confirment.

Une seule différence apparaît parmi les familles recomposées :quelle que soit la modalité de résidence, les jeunes dont le père a une nouvelle compagne ont des résultats qui ne diffèrent pas de ceux en résidence alternée ou en famille unie. Ces résultats ne se retrouvent pas pour les adolescents dont la mère a un nouveau compagnon.

Au final, les adolescents en résidence alternée sont plus adaptés aux niveaux émotionnel et social que leurs camarades vivant en résidence pleine. La taille de l’effet est de 25%, ce qui est un niveau plutôt important dans ce genre d’étude.

Poser la question des familles recomposées

Cette étude en rejoint beaucoup d’autres que nous avons déjà citées ici. Comme disent les signataires de l’article, « il n’y a aucune raison de s’inquiéter des conséquences de la résidence alternée sur les jeunes. »

Pour l’équipe norvégienne, cette étude soulève de nouvelles questions, notamment sur les familles monoparentales et recomposées. Les enfants vivant avec leur père seul semblent avoir des mères ayant des troubles mentaux. Les pères en résidence alternée semblent avoir un rapport à l’autorité plus équilibré que les autres. La présence d’une belle-mère semble compenser les conséquences de la séparation. Toutes ces questions restent en suspens.

La complexité des recompositions familiales rend donc les études plus délicates. De nouveaux facteurs seraient à prendre en compte, comme les relations aux demi-frères et sœurs et aux enfants des beaux-parents.

L’équipe de recherche norvégienne appelle alors à des études longitudinales car les modalités de résidence bougent, les familles se recomposent et les enfants et adolescents évoluent rapidement.