Le CIRA avec les associations suisses de coparentalité (suite)

Nous poursuivons le compterendu des points forts de l’assemblée annuelle du mouvement de la condition paternelle Vaud commencé dans notre billet de la semaine dernière (voir le billet du 22 mars 2017). Nous avons rapporté les interventions des chercheurs et des juges.

Dans ce billet nous présentons celles des deux vice-présidents du CIRA/ICSP : Chantal Clot-Grangeat, pour les professionnels, et Oliver Hunziger, pour la société civile. La première est psychologue, thérapeute, docteure en psychologie. Le second est président de l’association suisse pour la coparentalité (GeCoBi).

Une situation de séparation toujours difficile

Chantal Clot-Grangeat a rappelé que la résidence alternée se situait toujours dans le cadre de la séparation du couple parental et que pour les enfants cela était toujours une réelle épreuve. Ils perdent l’idée de pérennité du couple parental et cela question la pérennité du lien au parent : puisque mes parents s’aimaient et se quittent car ils ne s’aiment plus, est-ce que cela pourrait être pareil pour moi, leur enfant, et que l’un d’eux me quitte ?

La psychologue s’appuie sur les études scientifiques récentes car, en sciences, il faut savoir tenir compte des limites des premières études qui ont défriché un domaine mais dont les résultats ne sont plus valables ensuite. Si les astrophysiciens ne faisaient pas ce toilettage, on serait toujours en train de débattre entre une Terre plate ou ronde, au centre du système solaire ou intégrée à une galaxie.

Elle montre que la proportion de temps passée avec les deux parents est importante et qu’un seuil d’un tiers du temps est un minimum pour que les enfants ne subissent pas trop les dommages de la séparation. Un temps suffisant et régulier entre les enfants et chaque parent s’avère nécessaire pour offrir des opportunités de créer ou de renforcer des liens.

Elle montre aussi que dès le plus jeune âge, avant 3 ans, passer des nuitées chez les deux parents est essentiel. Les temps de coucher et de lever construisent des liens à tout âge. S’occuper des affaires scolaires ou des activités extra-scolaires permet de montrer son intérêt au quotidien de l’enfant.

Elle montre enfin que la résidence alternée a des effets positifs sur le lien aux deux parents, le père et la mère. Ce résultat est un peu contre-intuitif car on penserait que la mère pourrait perdre lorsque les enfants voient plus leur père or les recherches montrent le contraire. Cette situation positive pour les deux parents se retrouve jusqu’à l’âge adulte.

Construire la coparentalité

Le président de GeCobi fait état du fonctionnement de cette fédération d’associations locales.

La présidente de l’association des familles monoparentales, qui travaille régulièrement avec GeCoBi, témoigne du souci des femmes à ne pas être lésées dans les séparations et de leur intérêt à préserver le lien de leurs enfants avec leurs deux parents.

Le point de vue de cette association sur la résidence alternée est plutôt intéressant même s’il est discutable. Elle pense que la résidence alternée peut et doit être attribuée si le père a montré son engagement dans l’éducation de ses enfants en prenant un vrai congé parental ou en réduisant son temps de travail. Dans tous les autres cas, vu que seule la femme a fait des efforts, si elle ne souhaite pas la résidence alternée, alors il faut respecter son choix.

Cette exigence est discutable car dans l’état de notre société, en Suisse comme en France, les jeunes couples ont tendance à privilégier le salaire le plus important entre celui du père et de la mère. Vu l’écart des salaires selon le genre, c’est souvent l’homme qui travaille et la femme qui éduque les enfants. Il n’est donc pas normal que ce choix devienne un empêchement pour la résidence alternée.

Cette exigence est tout de même intéressante car elle force à travailler l’égalité entre les femmes et les hommes au moment des naissances et dans les jeunes âges des enfants (voir nos billets du 27 avril et du 20 juillet 2016). Pour rappel, la politique familiale actuelle en Suède attribue un congé de 90 jours pour chaque parent, les 10 mois restant pouvant être partagés à leur guise entre les parents.

Une grande partie des interventions et des discussions informelles a tourné autour des rapports entre les femmes et les hommes et des conditions de vie générales, notamment de la pression du travail et des besoins financiers.

Le débat est resté ouvert.

Cette coopération entre divers acteurs à l’initiative de GeCoBi paraît assez exemplaire. Il faudrait en suivre l’évolution et chercher à la reproduire ailleurs.