Inscrire la priorité à la résidence alternée dans les programmes politiques

Nous entrons dans le vif de la campagne pour les présidentielles et les législatives qui vont suivre. Quels sont les candidats qui vont se préoccuper des droits des enfants dont les parents se sont séparés ? Les responsables politiques qui s’intéressent à la vie quotidienne de ces nombreux enfants et de leurs parents devraient reprendre à leur compte un amendement adopté par le Sénat durant le dernier quinquennat mais retoqué par l’Asbbr-face-nov2015semblée Nationale. Comme cela existe en Belgique, cet amendement préconise de proposer en priorité la résidence alternée égalitaire.

L’objet de l’amendement précise que « bien que la loi ait progressivement établi l’autorité parentale conjointe, force est de constater que dans le cadre des affaires de divorce, la garde des enfants revient à la mère dans une très grande majorité des cas. Si la justice ne doit pas pouvoir imposer la résidence alternée des enfants en cas de divorce, rien, en revanche, ne doit pouvoir l’empêcher lorsqu’un des parents la demande. Il relève de l’intérêt de l’enfant d’être éduqué par ses deux parents dans une proportion équilibrée. »

L’amendement lui-même précise que « À défaut d’accord, en cas d’autorité parentale conjointe, le juge examine prioritairement, à la demande d’un des parents au moins, la possibilité de fixer l’hébergement de l’enfant de manière égalitaire entre ses parents. En cas de désaccord entre les parents, […] la préférence est donnée à la résidence en alternance paritaire. La décision de rejet de ce mode de résidence doit être dûment exposée et motivée. »

Voilà ce qui devrait entrer dans les programmes des candidats d’aujourd’hui !

Proposer la médiation

L’amendement propose aussi : « le juge entend le parent qui n’est pas favorable au mode de résidence de l’enfant en alternance au domicile de chacun de ses parents, exposant les motifs de son désaccord au regard de l’intérêt de l’enfant. »

L’expérience de la Belgique conduit à penser qu’il vaudrait mieux enlever cet élément qui conduit un des parents et ses avocats à envenimer les désaccords et même à générer un conflit.

La médiation pourrait alors être utile, à condition qu’elle vise à dégager un consensus favorable aux enfants dans le cadre de la séparation de leurs parents. L’amendement prévoyait d’ailleurs que « À l’effet de faciliter la recherche par les parents d’un exercice consensuel de l’autorité parentale, le juge tente de concilier les parties. Il leur propose une mesure de médiation et peut, après avoir recueilli leur accord, désigner un médiateur familial pour y procéder. »

Cette mesure fait plutôt consensus et devrait également entrer dans les programmes.

Rendre temporaire le refus de la résidence alternée

L’amendement précise aussi : « Le tribunal statue, en tout état de cause, par un jugement spécialement motivé, en tenant compte des circonstances concrètes de la cause et de l’intérêt des enfants et des parents. » L’expérience belge conduit à insister fortement sur ce point.

La décision de justice ne devrait pas être motivée par des considérations générales sur l’intérêt supérieur de l’enfant mais appuyée sur des éléments très précis relevant de chaque cas de séparation. Nos voisins belges poursuivent même cette piste en envisageant une justification collégiale du refus de résidence alternée, égalitaire ou non.

En France cela reviendrait à demander à la justice de ne pas ordonner d’arrangement « un week-end sur deux strict » sans l’accord d’une commission dédiée à l’étude de ces cas limites. Rappelons que, selon toutes les études scientifiques internationales, cet arrangement « classique » est celui qui nuit au bienêtre, au développement et à la santé des enfants (voir notre billet du 28 septembre 2016). Ainsi, les juges ne seraient pas pris par le temps et la surcharge de dossiers quand auraient à être prises des décisions qui engagent, pour des années, la vie quotidienne des enfants.

Selon les réflexions en cours en Belgique, pour les arrangements qui ne sont pas égalitaires, il faudrait également prévoir que la décision soit temporaire et soit rediscutée, sans appel particulier à la justice. Ce nouvel examen se situerait aux étapes importantes de la vie de l’enfant : l’entrée à l’école ou au collège ou au lycée, par exemple. Cette manière de procéder devrait éviter la multiplication des litiges et décharger la justice.  Elle pourrait rassurer les enfants qui ne peuvent pas rencontrer leurs deux parents à égalité. Elle permettrait aussi au parent privé de ces rencontres régulières avec son ou ses enfants de ne pas perdre espoir et d’éviter d’adopter des comportements extrêmes comme le non-respect de l’obligation parentale d’entretien, par exemple.