Selon Hamon, la résidence alternée est potentiellement très dangereuse

Nous avons écrit aux cinq candidats dont les sondages montrent qu’ils peuvent devenir président de la République pour leur demander leur avis sur la résidence alternée (voir notre billet du 8 mars 2017). Nous leur avons posé trois questions précises qui permettraient de mettre la loi française au niveau de celle de la Belgique, voire de faire les améliorations auxquelles les belges réfléchissent (voir notre billet du 26 octobre 2016). Nous précisions que la résidence alternée commençait pour le CIRA/ICSP à 5 jours par quinzaine de manière à ce que les enfants puissent construire ou renforcer des relations avec leurs deux parents (voir notre billet du 16 novembre 2016). Nous étions donc dans le cadre minimum et modéré de ce que visent les personnes qui réfléchissent au devenir des enfants et à l’équilibre des parents après séparation (voir notre billet du 17 février 2016).

Pour le moment et malgré plusieurs relances, seul Benoît Hamon a répondu, hier soir.

Hamon l’affirme, « la résidence alternée est potentiellement très dangereuse »

Dans sa réponse, le candidat Hamon ramène la question de la résidence des enfants après divorce à celle du règlement des conflits entre adultes dont les enfants pourraient servir de gage. Le point de vue de ce candidat et de son équipe est donc faussé dès le départ puisque les parents sont vus comme des irresponsables qui se servent de leurs enfants comme des objets de négociation. Même si cette situation existe, elle est loin d’être générale.

Le deuxième argument de la réponse du candidat Hamon fait aussi un amalgame qui montre du mépris pour les personnes qu’il souhaite pourtant gouverner. La lettre se réfère à Danielle Bousquet, présidente du Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, en 2013, pour faire cette déclaration « la résidence alternée est potentiellement très dangereuse à la fois pour les femmes victimes de violences conjugales et pour les enfants concernés. » Autrement dit, les hommes violents sont tellement nombreux qu’il vaut mieux écarter tous les pères de leurs enfants.

Les contradictions du programme de Hamon

Le candidat Hamon l’écrit dans sa lettre : « Pour ces raisons, je n’inscrirai pas dans mon programme vos trois propositions relatives à la garde alternée. »

Il y a très peu d’ouvertures vers un quelconque changement dans sa lettre qui, en s’appuyant sur les statistiques bien connues du ministère de la justice, estime que tout va bien en France puisque dans 80% des cas la décision des juges aux affaires familiales reflète l’accord des parties. Cette autosatisfaction est, pour nous, la marque d’un manque de courage politique dans les questions familiales (voir notre billet du 2 novembre 2016).

La seule ouverture serait le développement de la médiation. C’est effectivement une piste mais à condition que le contexte légal soit plus favorable que le nôtre aujourd’hui. Nos voisins belges expérimentent combien cela est difficile, comme l’expose une juge du tribunal de Dinant et les professionnels avec qui elle collabore.

Cette décision et cette absence d’ouverture entrent en contradiction avec l’une des mesures du programme de Hamon. Il y annonce que « Pour répondre à l’attente des jeunes parents et favoriser le partage des tâches parentales, j’allongerai le congé paternité à 6 semaines, dont 11 jours obligatoires ».

Sachant que de très nombreux couples se séparent (140 000 divorces par an, environ) que vont devenir tous ces pères qui auront construit des relations avec leurs enfants dès leur naissance si rien n’ait fait dans la loi pour favoriser la résidence alternée ? La réponse se devine et on peut penser que, comme aujourd’hui, le congé après la naissance sera si peu rémunéré que les couples hésiteront à le prendre. Cette tendance française est bien connue (voir notre billet du 27 avril 2016).

Le changement promis par Hamon et son équipe ne semble donc que de surface. En tout cas, en ce qui concerne la condition des enfants et des familles séparées, leur politique s’inscrira dans la même veine que celle de ce quinquennat.

Nous savons donc au-moins pour qui ne pas voter si nous sommes attachés à ces questions.

Une réponse avec des erreurs et deux beaux lapsus

En fait, hier nous avons reçu deux lettres, toutes deux émanant de la coordination  pôle courrier / sollicitation du QG de Hamon.  Vous pouvez lire la première lettre ici, elle est envoyée par une femme, et la seconde ici, plus officielle, envoyée par un homme.

Toutes deux comportent la même erreur : jamais le CIRA/ICSP n’a demandé la « résidence alternée automatique » mais nous avons demandé « la résidence alternée comme première option proposée aux couples qui divorcent, comme dans la loi en Belgique ». Manifestement, ni le candidat ni son équipe ne savent, ou ne veulent, tenir compte de différences aussi nettes.

Les deux réponses comportent une sorte de lapsus : dans la phrase de refus de Hamon, la résidence alternée est dite « garde alternée » comme avant la loi de 2002.

Veut-il revenir à cette situation ou, au fond de lui, ne croit-il pas à ce qu’il écrit?

La réponse reçue en premier comporte un autre lapsus, amusant ou révélateur, selon votre humeur. Cette première lettre reçue est adressée à la vice-présidence du conseil interministériel de la résidence alternée.

Est-ce que, en fin de compte, au fond de lui, Benoît Hamon trouverait raisonnable de faire entrer nos idées au gouvernement ?

La vice-présidente est prête à en discuter ! ! !