Les bébés aussi ont besoin du lien avec leurs deux parents

Les parents, les professionnels des affaires familiales et les acteurs de la justice familiale se demandent souvent si les jeunes enfants doivent être la plupart du temps aux soins d’un parent ou si cette attention doit être partagée de manière plus égale entre les deux parents. En cas de séparation, la question se pose de savoir si les nourrissons doivent dormir toujours dans la même maison ou non.

Ce sont les questions auxquelles répondent Richard A. Warshak et 110 autres signataires d’un article de consensus publié en 2014. Ce groupe est constitué de chercheurs et de praticiens reconnus internationalement dans le champ du développement du jeune enfant, de la psychologie, de la sociologie ou du travail social. Leurs conclusions sont tirées de la revue des articles scientifiques. Elles s’appliquent à toutes les situations, même de conflit, à l’exception de celles où les enfants subissent des abus avérés d’un parent.

Les jeunes enfants ne passent pas toutes leurs journées avec un seul parent

Les enquêtes le montrent, la plupart des jeunes enfants passent plus de temps avec leur mère qu’avec leur père mais ils passent rarement toute leur journée avec un seul parent. Dans les familles non-séparées, il est fréquent que les très jeunes enfants passent un temps important loin de leur mère lorsqu’ils sont avec leur père seul, à la crèche, chez les grands-parents ou ailleurs. Ces moments loin de la mère n’ont pas d’impacts négatifs sur la relation du jeune enfant avec elle. Pour les auteurs, le temps complet auprès d’un seul parent, souvent la mère, n’est pas nécessaire pour un bon développement de l’enfant, dans les familles unies et les autres.

Les recherches actuelles ne permettent donc pas de dire que les enfants de familles séparées ne peuvent pas passer un temps significatif loin de leur mère.

Garzena
Peinture d’André Garzena à Saint Etienne

A l’inverse, quelle que soit la structure familiale, les recherches concluent que les relations entre les parents et leurs enfants sont riches, sécurisantes et dynamiques lorsque le comportement des parents est cohérent, prévisible, fréquent, qu’il est chargé d’affection et tient compte des besoins de l’enfant.

Développer ce type de lien d’attachement avec au moins un parent protège durablement la santé psychique de l’enfant, au niveau du stress et de la résilience à la contrariété. Avoir des relations solides avec deux parents augmente ces bénéfices.

La détérioration des relations avec le père suite au divorce est un risque majeur

Les 110 chercheurs précisent que rien ne leur permet de classer la mère ou le père comme acteur principal ou secondaire dans le développement de l’enfant. Les relations normales des jeunes enfants avec leur mère ou leur père découlent de moments intenses mais qui sont loin d’être à plein temps avec l’un ou l’autre des parents. Ceci ne veut pas dire pour autant que le temps doit être partagé exactement entre les deux parents. La résidence alternée étudiée dans cet article de consensus débute quand les enfants peuvent passer au-moins 35% de leur temps avec un des parents.

Les 16 recherches les plus fiables concluent en faveur de la résidence alternée avec des nuits chez les deux parents pour les jeunes enfants en dessous de 4 ans comme pour les autres. Les 3 recherches qui vont dans le sens inverse concluent sur des résultats ambigus et comportent de grosses lacunes méthodologiques (par exemple, seule la mère a évalué l’état affectif de l’enfant). Le nombre de recherches fiables portant sur les très jeunes enfants en situation de famille séparée est limité.

Les recherches actuelles permettent de dire que les jeunes enfants peuvent passer des nuits chez les deux parents. Les activités de toilette, de repas, de coucher, de lever et d’accompagnement à la crèche fournissent des occasions exceptionnelles pour créer un attachement solide. Il n’existe aucune étude qui montre des risques pour l’enfant, dans le cas des familles sans maltraitance, séparées ou pas.

Les recherches fiables montrent aussi que les arrangements qui proposent moins de 6 jours de contact par mois avec l’un des parents et demandent aux enfants d’attendre plus d’une semaine pour rencontrer un des parents sont nocifs à la relation entre parent et enfant. Pour rappel, l’arrangement un week-end sur deux correspond à 4 jours par mois avec un espacement de 12 jours sans rencontre. La fréquence de l’alternance et la durée du temps avec chaque parent dépend cependant des situations et notamment de l’âge des enfants.

Les 110 experts internationaux sont donc favorables aux arrangements qui équilibrent le plus égalitairement possible le temps que les enfants, dès le plus jeune âge peuvent passer avec leurs deux parents. Pour eux la résidence alternée devrait être l’arrangement privilégié.