Un juge pour défendre les enfants dans les séparations ?

Dans son numéro du 24 mai dernier, le journal Le Monde publie un entretien avec François de Singly. Le sociologue se prononce sur la récente réforme du divorce, qui a été adoptée en première lecture à l’intérieur du projet de loi « Justice du XXI° siècle ». Selon lui la forme de cette réforme est scandaleuse et elle ne protège pas assez les enfants. Nombreux sont les opposants à cette réforme qui s’inquiètent aussi du manque de protection des enfants.

La loi prévoit que les couples qui se mettent d’accord pour divorcer n’auront plus besoin de passer devant un juge. Un notaire suffira à casser le contrat de mariage. Pour le sociologue, il s’agit d’une avancée vers un mariage contractuel entre deux personnes qui sont responsables de leurs actes. Sauf à considérer le mariage comme une institution immuable, il est clair que des adultes consentants n’ont pas besoin de la justice pour décider de leur séparation.

Faire protéger les enfants par un juge sans qu’ils le demandent

Le point qui paraît absurde et dangereux au sociologue, c’est que l’enfant pourra être défendu par un juge uniquement à sa demande. Selon lui, durant la période de séparation, les parents ne sont pas les plus compétents pour évaluer l’intérêt de l’enfant. Ils peuvent être aveuglés par la situation et oublier l’intérêt de l’enfant dans leurs décisions. Dans cette situation tendue, il faut absolument un juge pour représenter l’enfant mineur, sans qu’il ait à le réclamer, préconise De Singly.

Selon lui, la présence d’un juge marquerait que l’enfant, même pour tout-petit, existe en tant que personne. Son intérêt serait donc défendu, comme les avocats défendent celui de chaque parent. Pour lui, le juge serait une sorte de défenseur des droits de l’enfant dans la séparation.

Pour notre part, nous nous demandons si cette proposition peut changer les fonctionnements actuels. Comme nous l’avons mentionné dans notre billet du 25 mai, il vaudrait peut-être mieux mettre tous les acteurs autour de la table pour tenir compte des droits, de l’intérêt et du bienêtre des enfants.

Penser aux enfants nés hors mariage

Pour le sociologue, l’intérêt de l’enfant mérite d’être réfléchi vraiment. Si la volonté est vraiment de défendre les enfants, alors il faut prévoir la protection des droits des enfants nés hors mariage, et ils sont très nombreux. Pourquoi ne pas prévoir que l’intérêt de l’enfant soit défendu par un juge, pour toutes les séparations de parents mariés, pacsés ou concubins ?

De Singly trouve absurde que ces questions très importantes pour les couples et les enfants soient traitées dans un amendement et non pas dans une loi. Il interpelle la ministre et relance ainsi la question de la loi sur la famille, toujours en attente au Sénat.

C’est tout l’avantage de la proposition de François de Singly que de relancer un débat qui est passé à la trappe alors que le nombre d’enfants qui vivent dans des familles séparées est toujours plus important.