Impact de la séparation des parents sur la santé mentale et le bien-être de l’enfant

Les conséquences de la séparation des parents sur la santé et le bien-être de l’enfant sont une préoccupation pour les décideurs politiques, les professionnels de la famille et les responsables institutionnels, dans des contextes nationaux, comme en France (Coton & Roy, 2017), en Europe (Härkönen et al., 2017) et dans le monde (Emery, 2011). La participation de chaque parent à l’éducation, à l’instruction et aux soins de l’enfant favorisera l’intérêt supérieur de l’enfant. Mais comment faire ?

La participation de chaque parent à l'éducation, à l'instruction et aux soins de l'enfant favorisera l'intérêt supérieur de l'enfant.
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La revue de la littérature scientifique montre que ce domaine a trop souvent toléré des mesures douteuses, un manque de théorie et des stéréotypes (W. Fabricius et al., 2010). Néanmoins, une vision optimiste montre que ces défauts peuvent être surmontés lorsqu’ils sont discutés (voir par exemple les chapitres de commentaires dans Emery, 2011).

Quelles sont les perspectives tirées des résultats de recherche ?

Cinq points semblent faire consensus

Des résultats convergents sont produits par les recherches récentes sur les conséquences des différentes modalités de résidence des enfants dont les parents se sont séparés.

Sur une série de facteurs, notamment la réussite scolaire, la santé mentale et le bien-être, il existe des différences significatives entre les enfants qui vivent la séparation de leurs parents et les enfants de familles intactes. Néanmoins, au sein de ces deux groupes, les enfants vivent des expériences très différentes. Les enfants issus de familles intactes peuvent être confrontés à la pauvreté, aux conflits parentaux, à la violence et à une mauvaise éducation, tandis que les enfants dont les parents se séparent peuvent ne pas en faire l’expérience ou ne pas être en mesure de s’en sortir. Il en résulte que de nombreux enfants dont la famille est séparée fonctionnent aussi bien, voire mieux, que les enfants issus de familles intactes (Mooney et al., 2009).

La qualité et la quantité de l’implication de chaque parent doivent être prises en compte lorsque l’on veut promouvoir le bien-être des enfants (Adamsons, 2018). Par conséquent, les plans parentaux devraient renforcer l’implication des pères dans la vie de leurs enfants après une rupture parentale, car les pères apportent une contribution unique au développement sain de l’enfant. L’implication précoce des hommes dans la coparentalité les aide à rester impliqués à long terme, même si la rupture des parents bouscule leur manière d’être en relation avec leur enfant (W. Fabricius et al., 2010). L’engagement d’un père auprès de ses enfants dépend souvent de l’attitude de la mère et de ses attentes à son égard (Pruett, 2011).

En dessous de 4 ans, des séparations prudentes de courte durée sont appropriées et des séjours de nuit peuvent être recommandés lorsque l’enfant a développé une forte sécurité d’attachement au parent qui ne réside pas avec lui ; dès 4, les enfants peuvent être séparés du premier parent pendant des périodes plus longues (Emery, 2011). Lorsque l’enfant connaît le parent qui n’a pas la garde, souvent le père, le plan parental devrait maintenir puis augmenter le temps qu’il passe avec son enfant. Si l’enfant n’a qu’un souvenir minimal de son père, la période d’introduction et de prise en charge progressive sera un peu plus longue (Ludolph, 2018).

Les contacts fréquents entre l’enfant et les deux parents après la séparation n’ont pas d’influence négative sur les contacts ultérieurs. Les pères devraient s’engager auprès de leurs enfants pendant l’enfance pour augmenter leurs propres chances d’avoir des contacts réguliers dans les âges ultérieurs. Par conséquent, ce ne sont pas seulement les conditions de vie qui sont essentielles pour la relation parent-enfant après la séparation, mais aussi la persistance des contacts parent-enfant (Palmtag, 2020). Les liens d’attachement se développent et changent de qualité au fil du temps, tout au long de l’enfance et de l’adolescence et même à l’âge adulte. Il devient donc nécessaire de mettre en place des modalités de temps parental souples et susceptibles de changer à mesure que les enfants grandissent (Braver & Lamb, 2018).

Les termes de garde et de droit de visite tendent à être remplacés par des termes qui mettent l’accent sur la responsabilité partagée des parents à l’égard de l’enfant. Ce mouvement souligne l’importance de l’élaboration de plans parentaux, de la prise en compte du temps passé avec l’enfant et du partage de la responsabilité décisionnelle (Kelly, 2007). Les recommandations insistent sur l’élaboration de plans parentaux flexibles qui tiennent compte des besoins des enfants à tous les âges et permettent aux enfants d’avoir accès à chaque parent (Emery, 2011).

Des recherches toujours plus approfondies

Des études à grande échelle menées ces dernières années mettent en lumière des aspects spécifiques des conséquences de la séparation des parents sur la santé et le bien-être de l’enfant.

Pour les enfants de 2 ans et même les nourrissons (moins d’un an), des nuits fréquentes avec le parent non résidant sont associées à des relations plus sécures avec chacun de leurs parents à l’âge de jeune adulte (19 ans). L’association entre les nuitées passées dans la petite enfance chez chaque parent et la qualité des relations de l’enfant avec chaque parent suggère que les nourrissons développent des relations d’attachement avec leurs deux parents. Néanmoins, il reste à étudier ce qui se passe dans les années intermédiaires, entre petite enfance et fin de l’adolescence.(Fabricius & Suh, 2016).

Les jeunes enfants (3-5 ans) qui vivent à parts égales avec chaque parent ont un niveau de bien-être équivalent à celui des enfants de familles intactes. En outre, les parents et les enseignants constatent un niveau plus élevé de problèmes psychologiques chez les enfants vivant principalement avec un seul parent. Néanmoins, des études longitudinales sont nécessaires pour tenir compte des différences éventuelles avant la séparation(Bergström et al., 2018).

Les adolescents âgés de 12 à 15 ans qui ont passé autant de temps avec leurs deux parents après une séparation déclarent être plus à l’aise que les enfants confiés principalement à un seul parent. Cela est particulièrement vrai pour les jeunes de 15 ans. Il est cependant nécessaire de mener d’autres études qui puissent expliquer le contexte pré et post séparation des familles et leur répercussion potentielles sur le bien-être des adolescents en résidence alternée(Bergström et al., 2013; Fransson et al., 2018; Nilsen et al., 2018).

Construire ou maintenir des relations solides avec chaque parent séparé

Les enfants et les adolescents vivant en résidence monoparentale principale sont désavantagés, dans tous les cas et sur presque tous les indicateurs. Cela ne signifie pas que la résidence principale chez un parent est seule cause de cette situation, mais le développement d’un temps parental plus équilibré entre les parents séparés devrait réduire ces inégalités. La participation de chaque parent à l’éducation, à l’instruction et aux soins de l’enfant favorisera l’intérêt supérieur de l’enfant.

Par conséquent, les décideurs politiques, les professionnels de la famille et les responsables institutionnels devraient essayer de trouver des moyens pertinents pour permettre à l’enfant de construire ou de maintenir des relations solides avec chaque parent séparé.