Ces mots anciens qui freinent les idées neuves : #1 familles monoparentales

Nous proposons une série estivale à propos des mots qui servent à parler des conditions de vie des enfants après séparation de leurs parents. Les mots ne sont jamais ni neufs ni neutres. Souvent tirés du passé, ils encadrent la manière de penser le présent et l’avenir.

A propos des conséquences de la séparation parentale sur la vie des enfants, beaucoup de mots anciens freinent l’émergence des idées neuves adaptées à notre temps. Nous allons en décortiquer quelques-uns.

Cette semaine nous proposons : « famille monoparentale »

Selon la définition de l’INSEE, une famille monoparentale comprend un parent isolé et un ou plusieurs enfants célibataires (n’ayant pas d’enfant).

Ce concept de famille monoparentale est ambigu

Il regroupe trois réalités bien différentes : les familles dont un parent est décédé, les femmes seules qui n’ont jamais vécu avec le père de l’enfant et, enfin, le parent ayant la résidence de ou des enfants après séparation.

La dernière catégorie est la plus nombreuse.

Pour la qualifier, on devrait parler de « foyer monoparental » puisque la famille comporte toujours deux parents même après la séparation, même si la résidence des enfants est chez un seul parent.

On pourrait parler aussi de « familles bifocales » pour bien montrer que les deux parents existent et ont une relation avec les enfants dans le cadre de la coparentalité. Certes, cette relation est plus ou moins régulière et fréquente selon le mode de résidence des enfants mais elle existe toujours dans le cadre légal.

Une conséquence de la séparation du couple

Selon une enquête INSEE conduite en Ile de France, « En 2012, 452 000 familles franciliennes sont constituées d’une mère ou d’un père, seul(e) avec au moins un enfant de moins de 25 ans. Elles représentent un quart des familles avec enfant(s) de la région et comptent 1,2 million de Franciliens. […]

La situation de monoparentalité résulte de la séparation des conjoints pour trois quarts des familles franciliennes concernées. Pour une mère sur six, le deuxième motif déclaré de monoparentalité est de n’avoir jamais été en couple, tandis que le décès de leur compagne constitue la deuxième raison pour 13 % des pères. Quand les parents sont immigrés, ces deux proportions sont plus prononcées (+ 3 points). »

Dans les autres régions métropolitaines, la situation est semblable. Ainsi, selon une enquête INSEE conduite en Bretagne, « À l’image des autres régions de l’ouest de la France, la monoparentalité s’avère un peu moins fréquente en Bretagne (20 %) qu’au niveau national (22 %). Les conditions de vie de ces familles (ressources, habitat…), l’organisation de la vie domestique ou la conciliation entre temps professionnel et personnel se révèlent cependant les mêmes en Bretagne qu’ailleurs. En France, la grande majorité des familles monoparentales (82 %) ont pour origine une séparation, 13 % la naissance d’un enfant chez une personne vivant seule 1 et 5 % un décès. »

Parler de foyer monoparental et de famille à deux foyers

L’expression « famille monoparentale » ne correspond plus à la réalité d’aujourd’hui et trompe notre regard sur cette situation. Dans la plupart des cas, il s’agit de parents qui se sont séparés, la résidence des enfants est fixée chez l’un, le plus souvent la mère, et l’autre, le plus souvent le père, se voit attribuer un simple « droit de visite et d’hébergement ».

En parlant du parent résident, il faudrait donc parler de foyer monoparental dans une famille avec deux foyers.

Cette manière de dire permettrait de réfléchir autrement à la question de la résidence des enfants et de l’égalité femmes-hommes.

Plus d’informations lors de la conférence CIRA/ICSP Strasbourg 2018

Cette question des nouvelles configurations familiales est traitée à CIRA/ICSP Strasbourg 2018 par plusieurs conférencier.es. et notamment par Livia Olah, Professeure Associée au Département de Sociologie, de l’Université de Stockholm, Suède.